Il y' a dix mois , jour par jour, des familles de la ville de Regueb, situéee à 38 km de la ville de Sidi Bouzid, ou ce qu'on a convenu à appeler la révolution Tunisienne a commencé, ont perdu leurs enfants. En effet, le 9 Janvier 2011 cinq familles de Regueb ont du accepter la réalité amère de devoir vivre en s'adaptant à l 'absence éternelle de l'un ou l'une de leurs membres. Ces familles sont celles des martyrs tunisiens: Manel Boallagui (26), Raouf Kaddoussi (26), Mohamed Jabli Ben Ali (19), Moadh Ben Amor Khlifi (20), Nizar Ben Ibrahim Slimi( 22). ( voir mon billet du 9 Janvier 2011 ici ).
Aujourd'hui , j'ai refait le déplacement à Regueb pour revoir la famille du martyr Nizar Slimi avec qui j 'ai gardé un bon contact . En effet, Le corps de Nizar Selimi fut le premier corps d'un martyr que j'ai photographié pendant les événements de Décembre-Janvier en Tunisie. Un moment que je n'oublierai jamais, un moment ou je me suis libérée de toutes mes peurs malgré les douleurs et les souffrances.
Je suis arrivée à la ville vers midi et je me suis tout de suite dirigée vers le rond point , puis le marché , deux endroits emblématiques de la ville puisque tout le monde s'y rassemble pour discuter et puisque les noms des martyrs ont été gravés sur la grande colonne en marbre du rond point . Deux endroits très animés et pleins de vie.
Au marché, je me suis permise de poser quelques questions à certains jeunes, des marchands ambulants de fruits, par rapport au changement de leur situation après la "Révolution". Le regard perdu, ils m'ont tous donné la même réponse: "La situation n 'a pas changé pour nous, nous vivons dans la pauvreté et la misère, la situation va de pire en pis."
Ma destination suivante fut la maison du martyr Nizar Slimi. Un endroit, que j 'ai visité le 9 Janvier 2011 au soir et qui m'a marqué à vie. Insaf, la soeur de Nizar et sa maman nous ont accueilli chaleureusement. Après une petite discussion dans le véranda de la maison, nous sommes entrés dans la chambre ou fut filmée la vidéo ci dessous:
Un endroit qui m'est devenu très familier puisque je n'ai jamais arrêté de visualiser la vidéo et d'y penser. Le seul changement fut la présence des photos de Nizar qui couvraient tous les murs ainsi que deux certificats d'honneur délivrés à la famille par deux festivals locaux à la mémoire de Nizar.
La maman de Nizar s'étouffa dans ses pleurs quand elle m 'a expliqué que son fils ainsi que sa mort et son sacrifice ont été ignorés par les responsables et les membres des différents gouvernements transitoires qui se sont succédés au pouvoir tout au long des dix mois écoulés. Elle m'a expliqué qu'elle ne voulait pas d'aide financière. Tout ce qu'elle demandait c'est une reconnaissance du sacrifice de son fils unique dont la vie a été volée par un tireur qui est toujours libre. Tout ce qu'elle demande c 'est qu'on baptise une rue à son nom pour qu'on s'en rappelle ... une mère courage ...On a discuté les résultats des élections et elle m 'a expliqué qu'elle n'est pas allée voter puis qu'elle n 'avait confiance en personne. Cependant, elle ne comprenait pas le rejet de certaines listes de Hachmi Hamdi . Pour elle, c'était un rejet de toute une région , toute la région de Sidi Bouzid ... "On veut garder les gens du Sahel au pouvoir!" ... "Il s'agit de régionalisme".
Après avoir bu un bon café et mangé des fruits secs et des fruits cueillis dans le jardin de la famille, j'ai récité la "Fatiha" sur la tombe de Nizar et j 'ai repris le chemin pour rentrer.
Au centre ville, j 'ai pu revoir les graffitis et les peintures faites par les festivaliers qui ont visité la ville pendant le mois de Mars .
J'ai aussi pu discuter avec Noomene Ben Mohamed Kadri qui est en sit -in au même endroit depuis plus de sept mois pour réclamer son droit au travail . Il m 'a expliqué que pour lui la révolution n a pas eu lieu et que la corruption et le népotisme restent des pratiques courantes dans notre pays . Il ne quittera pas l'endroit sans l'obtention de ses droits .
Merci...
RépondreSupprimerObviously, the revolt turned to be quite alarming! I had the opportunity to discuss with Moroccan friends who are preparing for elections very soon: the non-Islamic political parties are working hard to merge and create a strong front. The time of the election, they’re forgetting their small differences and even their old strives in order to keep Morocco walking through the way of prosperity. Unfortunately, such coalitions never took place in Tunisia for different reasons and the result is so many lost voices among the real majority (65% liberal minds) along with high non voters almost 3 millions! A great mess! But I see here a great opportunity for activists to act on identifying common views and unifying the so many political parties around common value. These is still room for really honouring the front line people of the revolt!
RépondreSupprimerEmouvant. Merci Lina; grâce à toi, nous ne les oublierons pas !
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