Je suis une de ces personnes qui s'attachent aux endroits et qui finissent par établir une certaine relation avec chaque endroit qu'elles visitent. D'ailleurs , chaque fois que je quitte un endroit après y avoir passé une période peu importe qu'elle soit longue ou courte j'y laisse ma trace tel un chien qui marque son territoire. Certes, je ne vais pas au pont de pisser à chaque endroit ou je passe mais cela m'arrive de graver un mot dans le coin d'une petite armoire de ma chambre d’hôtel. Je m'attache aux villes, aux villages , aux chambres d’hôtel, à certaines salles de conférence , aux cafés , bars , bistrots , restaurants, pas les aéroports. Mais rares sont les endroits auxquels je tombe amoureuse. Rares sont les endroits qui me séduisent ,me draguent, me font la cour , m'embrassent , me font l'amour , m'habitent et me poussent à un accouchement textuel.
Budapest est l'une de ces exceptions, une de ces belles surprises , de ces souvenirs doux et agréables qui nous hantent à jamais et restent gravées dans nos mémoires éternellement. J'y ai passé trois jours. Trois jours qui se sont écoulés en un coup d’œil , qui sont passés comme l'éclair...Chose inhabituelle pour moi qui a du mal à m'éloigner de ma Tunisie pour plus de quarante- huit heures. Chose bizarre pour moi qui au bout de vingts-quatre heures, passées loin de ma Tunisie tombe dans la tristesse et commence à broyer du noir.
Je suis arrivée à Budapest le Vendredi soir. Le cœur n'y était pas je pensais déjà à la manifestation du lendemain à Tunis et que j 'allais rater : les syndicalistes et les citoyens libres avaient décidé de se rebeller contre un gouvernement inefficace et hypocrite et des obscurantistes qui essayent de nous voler notre pays et de nous confisquer notre révolution qui tel un bébé à commencer à faire ses premiers pas et qui trébuche et qui en se heurtant à des obstacles , tombe et se relève et refait l'exercice jusqu'à ce qu'il apprenne à marcher impeccablement et jusqu'à ce qu'il tienne la route , le bon chemin .Je ne pouvais pas annuler mes engagements au dernier moment en prétextant une manifestation improvisée . Je devais participer à une conférence à l'Université de l'Europe Centrale et participer à un débat suite à la projection du documentaire 'Plus jamais peur" de Mourad Bechikh'. De l'aéroport à l’hôtel et quel hôtel. Je me suis retrouvée au Méridien. Mon accompagnateur s'habilla d'un beau sourire en m'informant que Bush y a séjourné en passant par Budapest. Le temps de me changer et et me voilà dans la salle de conférence après avoir parcourir une petite distance à pieds pour arriver jusqu'à l'université . Une petite distance au cours de la quelle les rues de la ville m'ont charmée. Le moment de la journée , entre chien et loup ajoutait à la beauté de la ville. Le jeu de lumière qui en était la conséquence donnait aux bâtiments d'une architecture extraordinaire une autre dimension.Nous avons eu le temps pour faire un détour et visiter la Basilique de Stéphane et je fus émerveillée par son architecture et et sa beauté. Mon accompagnateur me raconta une partie de l'histoire de la ville et me donna des informations à propos des activités des activistes et des mouvements révolutionnaires. Il m'a beaucoup parlé de mouvements artistiques underground et de la possibilité d'organiser n'importe quel événement culturel ou politique puisque les propriétaires des cafés et restaurants offraient leurs salles gratuitement.
Ma conférence s'était bien déroulée. Timide de nature, ma langue d'est déliée ce soir là. Je devais parler pendant vingts minutes, mon intervention s'était étalée à Quarante cinq. L'audience était vraiment attentive . Après cela j'avais eu droit à des dizaines de questions avant d'aller dîner dans un 'Hummus Bar '. Et oui j'ai eu droit à un dîner libanais à Budapest et j'ai vraiment adoré la bouffe. J'étais dans un groupe multiculturel: deux Français , une autrichienne , un Américain, un Tunisien et un Hongrois. nous avons discuté de tout et de rien mais surtout de politique et d'activisme. Je suivais la discussion mais je suivais les dernières nouvelles de Tunis aussi grâce à mon iPhone récemment acheté- et oui j' en ai mis beaucoup de temps avant de pouvoir m'offrir ce petit bijoux et grâce à la connexion disponible dans tous les cafés et restaurant de la ville. Avant de quitter l'endroit, on s'est donné un rencard pour participer à une manifestation/ flash-mob contre l'ACTA .
De retour à ma chambre je me suis préparé un café et je me suis connectée, distance obligeait. Le réseau était le seul lien entre ma Tunisie et moi à ce moment là. Je me suis couchée vers les quatre heures du matin pour me réveiller à neuf heures . Après un petit déjeuner copieux, j'ai fait un petit tour à pieds et j'en ai profité pour capturer quelques paysages au petit matin avant de me reconnecter pour suivre les derniers développements et le déroulement de la manifestation. J'ai marché tout au long du Danube et j'ai beaucoup admiré les différents paysages malgré le froid glacial qui frappait mon visage. En traversant un jardin public j'ai découvert un mémorial en hommage à Michael Jackson improvisé par des jeunes de la ville.
A 13 heures, je suis partie pour un tour à Budapest avec trois Français: une accompagnatrice et deux cinéastes qui participait au deuxième festival du film francophone à Budapest. Nous avons pris le bus, et au passage je dirai que l'état des moyens de transport à Budapest ressemble à celui de nos moyens de transport, et nous avons traversé le Danube pour nous retrouver de l'autre coté de la ville. Nous avons quitté Pest pour nous retrouver à Buda qui nous ouvrait les bras et nous offrait une vue extraordinaire sur l'autre rive:
Par la suite nous avons visité le château de Buda et encore une fois je fus émerveillée par l'architecture. Nous avons assisté à la cérémonie du changement des gardes du palais présidentiel avant de savourer un bon déjeuner du coté de Pest. L'après-midi, j'ai participé à une manifestation organisée par anonymous et d'autres groupes de cyber-activistes contre l'ACTA. Le nombre des manifestants n 'était pas grand mais ce fut une bonne occasion pour discuter la liberté d'Internet. Une rencontre avec l'un des membres du Parti pirate Berlinois a couronné ma manifestation. Des discussions et des projets ...
Je voulais finir ma soirée par une visite aux bains chauds de Budapest mais j'étais tellement épuisée et je voulais suivre les dernières nouvelles. Elles sont venues confirmer les craintes que j'avais exprimé le soir d'avant durant ma conférence à l'Université de l'Europe Centrale , la répression et la violence policière étaient de retour . J 'ai appris que plusieurs de mes compatriotes ont été tabassés par la police ainsi que par la milice du parti islamiste au pouvoir. La majorité des victimes de ce déferlement de violence étaient des femmes, un pur hasard ???
Les gaz lacrymogènes et les coups de matraques et de brodequins ont fait leur retour . Un déluge de violence , me raconta-t-on ...une avalanche d'insultes et d'injures ...
Je n'ai pas pu retenir mes larmes, je n'ai pas pu m’empêcher de sombrer dans des instants de dégoût de désespoir et de haine oui de haine, moi qui a toujours appelé à la tolérance...J'ai eu une nuit horrible et je ne sais même pas comment je me suis retrouvée entre les bras de Morphée avant d’être réveillée le jour d'après par la sonnerie de ma chambre.
Une autre journée de tourisme pour moi, de nouvelles découvertes et de nouveau restaurants de nouveaux goûts. Une amie m'a twitté qu'il fallait visité le Café Central et ce fut ainsi . J'ai pu y savourer un bon macchiato ainsi un délicieux pannacotta et j'ai aussi admiré la beauté de l'établissement historique puisque ça date de 1887.
Puis ce fut la projection du film et le débat dans l 'un des plus prestigieux théâtres de l'Europe : l'Urania. Et j'ai fini ma soirée par un bon dîner avant de découvrir Budapest by night :
Les gens faisaient la fête partout , une ville qui en dort jamais : des rires , des sourires , des chansons ...
Le lendemain , j'ai eu droit à une série d'interviews avant de retrouver ma bien- aimée .Sur le chemin du retour j'ai croisé la statue de la liberté perchée sur le haut d'une colline .Je l'ai capturée avec mon appareil photo mais l'image était un peu floue à cause du contre -jour et des saletés qui couvraient les vitres de la voiture et qu'il fallait nettoyer :l'image était floue tout comme elle l'est pour ma Tunisie: